Salah Abdeslam, vendredi 15 avril 2022 SERGIO AQUINDO POUR LE MONDE
La durée inédite du procès le 13 novembre aura du bon : à voir comment évoluent les hommes en boîte au fil des semaines, surtout une. Un chapitre important du débat s’est achevé vendredi 15 avril, avec la conclusion de l’interrogatoire de l’accusé. En prononçant ses dernières paroles, Salah Abdeslam s’est laissé submerger par l’émotion et a demandé pardon aux victimes. L’image saisissante du “combattant de l’Etat islamique” autoproclamé faisant rage dans le box au premier jour du procès semble désormais lointaine.
Lire aussi : Article réservé à nos abonnés Au procès du 13 novembre, Salah Abdeslam dit sa vérité pour la première fois le soir des attentats
Son avocate, Olivia Ronen, venait de lui demander s’il regrettait de ne pas avoir mené à bien son opération suicide. “Je ne regrette pas d’avoir abandonné, je n’ai pas tué. Aujourd’hui, ces gens sont vivants. S’ils savaient ce qu’ils avaient raté… Ils s’amusaient naïvement, j’étais devant eux. Et je suis parti. Je ne suis pas désolé pour eux, pour moi, pour ma famille. Ma mère me dit qu’elle voit ses deux fils en moi, que je compense la perte du premier… », raconte-t-il en pensant à son frère Brahim, qui a explosé.
A l’évocation de sa mère, ses yeux se sont brouillés, il a levé les yeux, a cherché de l’air, puis a poursuivi : « Cette histoire du 13 novembre a été écrite dans le sang des victimes. C’est leur histoire et j’en fais partie. Ils sont connectés à moi et moi à eux. Il cite un hadith : “Haïssez modérément votre ennemi, peut-être qu’un jour il sera votre ami.” Il s’est ensuite adressé aux partis civiques : “Je vous en prie, détestez-moi modérément aujourd’hui. Je m’excuse auprès des victimes. Je sais qu’il reste de la haine entre vous et moi, je sais que nous ne serons pas d’accord, mais s’il vous plaît, pardonnez-moi. »
Déni et immaturité
Le pare-chocs s’est fendu. La dureté des éléments de propagande qu’il a proférés au début du procès a fait place à des propos sensibles. Salah Abdeslam donne l’impression d’avoir passé ces sept mois à débattre, à se rassembler à la recherche d’une nouvelle identité. Le travail n’est pas terminé. L’ambivalence de celui qui refuse de condamner les attentats mais dit avoir renoncé à exploser avec “l’humanité” est toujours là. Son immaturité aussi. Il lutte toujours pour assumer l’entière responsabilité du massacre.
Quelques instants avant ses larmes, un dialogue avec un avocat des parties civiles illustre l’étendue de son déni : « Je n’ai pas tué. Je mérite ce qui m’arrive, mais je ne paierai pas pour ceux qui ont tué au Bataklan, sur les gradins, au Stade de France. Son avocat souligne qu’il a placé « trois bombes humaines qui ont tué » devant le Stade de France : « Comprenez-vous que cela puisse être choquant quand vous déclarez que vous n’avez tué personne ?
Il vous reste 58,72% de cet article à lire. Ce qui suit est réservé aux abonnés.
Add Comment