Le vote blanc ou zéro a été le premier lors d’une consultation de Jean-Luc Melanchon avec ses partisans pour le second tour de l’élection présidentielle. Que ce soit par vote vide ou par abstention, les deux tiers de ces militants ont choisi de ne pas voter en faveur d’Emmanuel Macron. Pourtant, le leader français Insoumise a obtenu des résultats très élevés auprès des jeunes et c’est le clivage entre les générations qui se dessine aujourd’hui dans l’électorat, selon Mathieu Gallard, directeur de recherche à l’institut de recherche Ipsos, interrogé le 17 avril dans franceinfo .
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franceinfo : Y a-t-il un clivage entre les générations lors du scrutin ?
Mathieu Gallard : C’est quelque chose qu’on a déjà vu en 2017, mais c’est devenu encore plus prononcé. Chez les jeunes, les moins de 35 ans, on note un très fort vote en faveur de Jean-Luc Melanchon, qui occupe la première place parmi eux, mais aussi en faveur de Marine Le Pen, tandis que chez les adultes, les 60 ans et plus, Emmanuel Macron vient de loin. Donc il y a vraiment de plus en plus de comportements politiques totalement différents entre les générations.
️ Voter au premier tour de l’élection présidentielle sur la base de l’âge est un facteur important pour les trois principaux candidats. 1/2 pic.twitter.com/g0Z4hjS3Kh
— mathieugallard (@mathieugallard) 11 avril 2022
Évidemment, cet écart générationnel recouvre notamment des différences d’attitudes et de préférences quant aux politiques économiques et sociales à mener, ainsi que des conflits de valeurs, notamment avec toutes les questions liées aux droits des minorités à l’immigration pour lesquelles jeunes et vieux ont des opinions et des perceptions très différentes.
Les jeunes peuvent-ils aussi se sentir un peu oubliés par les macros ?
Emmanuel Macron en avait beaucoup dit et mis beaucoup l’accent sur la jeunesse lors de sa campagne en 2017, c’est vraiment une tradition des campagnes électorales. Et c’est vrai que certains jeunes ont pu avoir le sentiment d’avoir été oubliés, notamment pendant la crise sanitaire. On le sent vraiment quand on écoute les jeunes, qu’ils soient étudiants ou jeunes travailleurs dans le domaine. Et il y a eu une campagne de Jean-Luc Mélenchon, extrêmement efficace sur le terrain, parlant notamment de pouvoir d’achat, qui a attiré une partie des suffrages de cet électorat. Marine Le Pen était aussi dans le même créneau, très active et très offensive sur ce sujet de société. Alors évidemment, cela a attiré ces jeunes qui entrent dans le monde du travail et qui sont extrêmement précaires, voire inquiets pour leur avenir.
Il y a des problèmes sociaux, mais il y a aussi des problèmes climatiques, l’idée d’un monde ruiné par les Boomers ?
Absolument. C’est vrai qu’on a vu pendant la campagne que l’environnement est une préoccupation importante pour les Français, juste derrière la question du pouvoir d’achat, mais chez les jeunes, très élevée, presque aussi forte que le pouvoir « d’achat ». Et puis apparemment Jean-Luc Mélenchon, à droite, a eu l’intelligence d’exposer cet aspect environnemental lors de sa campagne électorale. Et cela lui a permis de prendre l’avantage au sein de la gauche sur Yannick Jado, pourtant clairement identifié en début de campagne comme le candidat le plus fort sur cette question environnementale.
Ne sommes-nous pas dans un phénomène plus classique, de plus grande radicalité chez les jeunes et de plus grande modération chez les plus âgés ?
Quant à la modération des personnes âgées, nous dirons que chez les électeurs âgés il y a, quoi qu’il arrive, choix après choix, des comportements plus légitimes. Il y a une tendance à soutenir davantage le parti au pouvoir. Cela se produit presque systématiquement et également dans de nombreux pays.
« L’extrémisme des jeunes ? Pas nécessairement. Il y a quelques années, il y a au moins une décennie, il n’y avait pas vraiment beaucoup de différences notables entre le vote des jeunes et le vote des autres couches de la population. »
Mathieu Gallard
à franceinfo
On a vu qu’ils votaient un peu plus pour le centre-gauche, pour les écologistes, mais les différences n’étaient finalement pas très marquées. En 2017, pour la première fois, on avait une différence vraiment nette, et là c’était même mis en évidence. Dans une France qu’on sait très morcelée sur le plan social, sur le plan géographique, si on y ajoute cette dimension des générations, ça brosse un portrait un peu inquiétant du pays et de son devenir.
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Dans la consultation lancée par les Insoumis, leurs militants avaient le choix entre des abstentions, un vote blanc ou le vote de Macron au second tour. La semaine dernière vous nous disiez que selon les sondages Ipsos, près de 20% des électeurs de Jean-Luc Mélenchon voteraient pour Marin Le Pen ?
Jean-Luc Mélenchon et les dirigeants de La France insoumise ont été très clairs. Au soir du premier tour, ils ont dit “il n’y aura pas de vote pour Marin Le Pen”. Donc, logiquement, ils n’ont pas proposé cette option à leurs combattants. Ce que l’on constate, c’est qu’en tout cas, en quelques jours et après le premier tour, la part des électeurs de Jean-Luc Mélenchon qui voteraient pour Marin Le Pen a eu tendance à légèrement diminuer en raison de la météo. [elle est passée de 18% le 13 avril à 16% le 16 avril, selon le sondage Ipsos pour franceinfo et Le Parisien-Aujourd’hui en France]. On a l’impression que le fameux Front républicain se crée très, très lentement, dans une version très dégradée par rapport à ce qu’on avait en 2017 et encore plus en 2002. Mais petit à petit il se met en place. Nous avons désormais moins d’un électeur Jean-Luc Mélenchon sur cinq qui fera ce choix, contre un grand tiers qui votera pour Emmanuel Macron.
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