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Guy Lafleur est décédé à l’âge de 70 ans

L’ancien joueur des Canadiens de Montréal, Guy Lafleur, est décédé à l’âge de 70 ans après une longue bataille contre le cancer du poumon, a annoncé sa sœur sur Facebook.

Posté à 19h58

Richard Labé La Presse

Avant de devenir Guy, le fameux Guy adoré par la foule du Forum de Montréal, Guy Lafleur était tout simplement © Guy Lafleur.

Juste un homme de Thurso, du Québec rural, avec un rêve. Un rêve et aussi un talent fou. Très jeune, il remplissait les filets adverses de rondelle, qu’il lançait avec un bâton de feu, avec une telle rapidité que la plupart des gardiens ne pouvaient pas la voir.

Passé au hockey jeunesse avec les Remparts de Québec de la LHJMQ, Guy Lafleur commence à bâtir sa légende : une saison de 170 points en 1969-1970, puis une autre, encore plus spectaculaire, de 209 points (dont 130 à nu !) en seulement 62 matchs en 1970-1971, ce qui en ferait l’une des premières élections les plus convoitées de l’histoire du hockey de la Ligue nationale lors du repêchage de 1971.

La légende est déjà bien connue, sans doute aussi bonifiée au fil du temps : les California Seals, le mauvais club de l’expansion de 1967, ont eu la mauvaise idée d’échanger leur premier choix lors du repêchage de 1971, les Canadiens et le directeur général Sam Pollock qui probablement n’y croyait pas lui-même. Et pourtant, c’était la réalité : en échange de leur premier choix, les Seals avaient une « chance » de remporter le premier choix du Canadien au repêchage de 1970 et un joueur mineur, Ernie Hicke.

PHOTO POL-ANRI TALBOT, ARCHIVES DE LA PRESSE

Pollock lui-même en 1971

Le Canadien ne savait que trop bien que le premier choix global de l’enchère de 1971 mènerait à l’acquisition d’un joueur de haut niveau, soit Lafleur ou Marcel Dion, l’autre vedette du hockey junior canadien. La honte du choix, en somme et quel que soit le nom de l’élu ; le Canadien n’aurait certainement pas tort.

Il n’avait vraiment pas tort.

Bien sûr, il a fallu du temps à Lafleur avant que ça commence. Avec les Canadiens, ses trois premières saisons ont été jugées décevantes, dont la saison 1973-1974, où une production de 21 buts en 73 matchs a été mal accueillie par de nombreux partisans. La rumeur dans la foule n’était pas très favorable. “Pour plusieurs, Guy Lafleur serait un bon joueur, sans plus”, écrivait l’auteur de l’époque Georges-Ebert Germain dans Ombre et lumière, une biographie parue en 1990.

Puis, en 1974-1975, ce fut l’explosion.

PHOTO JEAN GUPIL, ARCHIVES DE LA PRESSE

Lors de la saison 1974-1975, la production de Guy Lafleur explose. Il franchit pour la première fois la barre des 50 buts.

Après des saisons de 29, 28 et 21 buts, Guy Lafleur a continué à marquer un spectaculaire 53 buts en 1974-1975 pour marquer un total de 119 points en 70 matchs. C’est ce joueur qui attendait le Canadien et ses partisans lors du repêchage de 1971, et le voilà enfin apparu. Une coïncidence? L’éclosion du nombre 10 est survenue au moment même où le Canadien bâtissait la deuxième dynastie de sa longue et glorieuse histoire; la saison suivante, 1975-1976, Lafleur ajoute une récolte de 125 points à son palmarès, en plus de permettre à son club de détrôner les méchants Flyers de Philadelphie lors de la grande finale.

Au total, l’heure de gloire de Lafleur ne se calculera pas en heures, ni en saisons : six saisons consécutives avec au moins 50 buts, dont la saison 1977-1978 avec 60 buts, le point culminant de sa carrière. Il affrontera le trophée Conn-Smythe, décerné au joueur le plus utile des séries éliminatoires, au printemps 1977, grâce à ses 26 points en seulement 14 séries éliminatoires. Pendant ce temps, il a permis aux Canadiens de remporter la Coupe Stanley quatre fois de suite, la dernière du lot au printemps 1979.

C’était alors la fin de jours merveilleux pour lui. Blessé après un ignoble coup, il a dû assister, de loin et impuissant, à l’élimination surprise du Canadien au printemps prochain contre les North Stars du Minnesota. Cela marque le début d’une nouvelle ère, bien moins glorieuse, pour les Canadiens, et Lafleur lui-même en souffre : la saison suivante, celle de 1980-1981, il rate 100 points pour la première fois en sept ans après s’être contenté de 70 points. en 51 matchs. Des chiffres plus qu’honorables, certes, mais pas assez au goût de ses supporters, qui se sont remis à grogner.

PHOTO ROBERT NADON, ARCHIVES LA PRESSE

Guy Lafleur n’a pas marqué autant de points lors de la saison 1980-1981.

Petit à petit, il y a un échec, une rupture, et la relation de Lafleur avec la direction du club, souvent tendue, se détériore davantage avec l’entraîneur Jacques Lemerre, un ancien coéquipier qui lui enlève certaines responsabilités. Déçu, le démon au surnom de Russie en a assez et choisit de rentrer chez lui en milieu de saison, en novembre 1984. Une retraite à 33 ans qui surprend le monde du hockey. Mais beaucoup attendent un possible retour, dont Henri Richard, l’ancienne gloire de Glorious, qui a déclaré : “Je n’y crois pas, je lui donne un an et je pense qu’il reviendra. »

Eh bien, il faudra trois ans avant qu’il ne revienne.

Lafleur reviendra en effet sur la glace, mais cette fois sous le maillot des Rangers de New York, lors de la saison 1988-1989, le temps d’amasser 45 points en 67 matchs. Il jouera encore deux saisons, ses deux dernières, avec les Nordiques de Québec, avant de prendre sa retraite à la fin de la saison 1990-1991.

Au fil des ans, le nom de Guy Lafleur restera associé au hockey partout au Québec, notamment par une boisson énergisante portant son surnom (« Le pouvoir de la fleur »), ainsi que par ses nombreuses apparitions publiques, au Centre Bell ou dans le couloirs de son restaurant de Rosemer, Bleu-Blanc-Rouge, qu’il vendra en 2012.

Mais ce n’est pas ce dont nous nous souviendrons. On retiendra d’abord ses 560 buts, ses cinq victoires en Coupe Stanley, et aussi « Man ! Mec! Mec! qui résonne lors de nombreuses soirées au Forum de Montréal. Et qui sans doute résonnent encore dans les soirées d’hiver de ce coin du centre-ville.